L'univers n'est pas
vide, puisque nous sommes là, et que nous voyons plein d'
étoiles dans
le ciel. Alors, pourquoi tous les corps matériels ne s'effondrent-ils
pas en un même point, sous l'effet de leur gravité, laissant un univers
vide partout ailleurs ? Newton ne voit que trois façons d'éviter cet
effondrement : l'univers est infini, et uniformément peuplé d'
étoiles,
ou bien l'univers est en expansion, ou bien l'univers n'est pas très
vieux et n'a pas eu le
temps de se contracter. Pour des raisons
philosophiques, Newton préfère penser que l'univers est infini et
éternel...
Même écarté ainsi le risque de l'effondrement gravitationnel de
l'espace newtonien, il subsiste un très grave problème: Toute
le monde peut constater que le ciel est noir, la nuit. Or ceci est loin
d'être attendu dans un univers tel que celui que décrit Newton...
Imaginons-nous en effet dans une forêt qui présente les mêmes
caractéristiques que l'espace : infinie (on trouve toujours des arbres,
aussi loin que l'on voyage), uniforme (la densité d'arbres est à peu
près constante dans toutes les directions), éternelle (il a toujours
existé des arbres, et il en existera toujours), et statique (les arbres
ne se déplacent pas). Dirigeons notre regard à l'horizontale dans
n'importe quelle direction. Que voyons-nous ? Il est facile de se
convaincre que le regard s'arrête toujours sur la même chose : un tronc
d'arbre. Un tronc d'arbre situé à quelques dizaines de mètres, en
général, ou à quelques kilomètres si l'on a la "chance" de passer entre
les troncs des arbres plus proches. Si l'on transpose cela à
l'observation du ciel, notre rayon visuel, dirigé dans n'importe quelle
direction du ciel nocturne, devrait donc s'arrêter sur la surface d'une
étoile. loin d'être noir, le ciel de l'espace newtonien devrait avoir
une brillance uniforme, de l'ordre de celle de la surface du
Soleil !
En effet, la brillance superficielle B avec laquelle est vu un objet
étendu ne dépend pas de la distance r à laquelle on l'observe. Elle
s'écrit en effet B = I.
σ
, où I est l'intensité ( énergie reçue d'une unité de surface vraie de
la source) dans la direction de l'observateur, et
σ
la surface apparente (c'est à dire projetée sur une perpendiculaire à
la ligne de visée) d'un élément de la source imagé sur le détecteur (la
rétine par exemple).
Ainsi, une au moins des hypothèses newtoniennes (uniformité, infinité,
éternité, staticité) est fausse... Cette remarque a été formulée le
plus clairement par Olbers au XIXe siècle, et son nom est resté attaché
à ce "paradoxe d'Olbers". Mais elle est bien antérieure, et il est
remarquable qu'une déduction d'une telle portée ( l'univers est soit
fini, soit non-statique, soit relativement jeune, soit non-uniforme)
soit à la portée de tout observateur perspicace armé de ses seuls
yeux... On a bien essayé d'invoquer une absorption de la
lumière des
étoiles par l'espace, supposé "poussiéreux", en quelque sorte; mais
ceci ne fait que repousser le problème dans le
temps, car le matériau
absorbant doit finir par s'échauffer jusqu'à être en équilibre avec le
rayonnement stellaire qu'il reçoit, et le ciel retrouver sa brillance.
On pense aujourd'hui que le ciel nocturne est noir parce que l'univers
est jeune et en expansion; surtout pour la première raison
d'ailleurs.