Les scientifiques tentent de déchiffrer le bulletin de naissance de
l'Univers depuis le début du XXème siècle. Mais cela fait moins de 40
ans qu'ils sont en mesure de répondre à quelques questions
essentielles. Quand ? Il y a 14 milliards d'années. Dans quelles
circonstances ? À la suite d'une incommensurable "explosion" : le Big
Bang. Au début, il n'y avait ni espace, ni
temps. Et encore moins de
matière.
Vint alors le Big Bang, un indescriptible fracas qui donna naissance à
l'Univers. Quatorze milliards d'années plus tard, les scientifiques
peuvent enfin nous conter cette naissance... et la manière dont ils ont
percé le mystère!
Des origines à nos jours
L'Univers, sous sa forme la plus primaire et la plus inhospitalière, a
atteint sa taille adulte en moins d'une minuscule fraction d'un
ridicule milliardième de seconde. Mais il a fallu attendre beaucoup
plus de
temps pour que toutes les pièces du grand échiquier se mettent
en place : quelques minutes pour qu'apparaissent les atomes, 300.000
ans pour que la
lumière se libère de la matière et plusieurs centaines
de millions d'années pour assister à la naissance de nos bonnes
vieilles
galaxies...
Avant le big bang
Quatorze milliards d'années nous séparent du milliardième de seconde
qui a vu se créer les prémices de notre univers. Grâce à différentes
théories vérifiées par des travaux en laboratoire,
astrophysiciens et
cosmologistes savent donc décrire aujourd'hui les principaux évènements
survenus depuis le Big Bang. Immanquablement, une grande question
s'impose : qu'y avait-il avant ? Avant l'apparition du
temps, de
l'espace et de la matière ?
Théories alternatives
La théorie du Big Bang a la peau dure. Elle a éliminé de nombreuses
rivales au cours du XXème siècle. Parmi les principales alternatives,
la théorie de " l'univers stationnaire ", défendue par le Britannique
Fred Hoyle dans les années 1950, fut longtemps considérée comme la plus
plausible. Avant d'être démentie par différentes
observations...
L'univers en expansion
Les
équations de la
relativité générale conduisent à des univers non
statiques (en expansion). Pour des raisons assez philosophiques,
Einstein considère que cela n'est pas acceptable, et introduit une
variable supplémentaire ad hoc, la
constante cosmologique , qui vient
contrebalancer l'effet du contenu matériel de l'univers. En effet,
comme dans l'espace de Newton, ce dernier aurait comme effet de faire
s'écrouler sur lui-même l'univers dans son ensemble. Ce paramètre
supplémentaire permet d'obtenir un univers statique. Malheureusement
pour Einstein, quelques années plus tard, Hubble et Humason démontrent
expérimentalement que l'univers EST en expansion. Einstein dira plus
tard que l'introduction de la
constante cosmologique est la plus grande
erreur de sa vie. Et pourtant, des observations très récentes remettent
singulièrement sur le devant de la scène ce paramètre longtemps
négligé, comme nous le verrons plus tard.
En attendant, Hubble
et Humason observent des
galaxies, et plus précisément des étoiles
céphéides dans ces
galaxies. Les céphéides sont intéressantes car ce
sont des étoiles supergéantes, visibles de très loin, à l'éclat absolu
constant et connu (enfin, à peu près connu...) dès que l'on connait la
période de leur variabilité.
Ils obtiennent ainsi la
distance
d'un certain nombre de
galaxies, dont ils mesurent par ailleurs les
vitesses par effet Doppler-Fizeau. Hubble et Humason ont porté sur un
graphique la vitesse en fonction de la
distance, et obtenu une fonction
linéaire.
La vitesse est toujours positive (sauf pour des objets
très proches, dont les vitesses d'agitation particulières peuvent alors
dominer), c'est une vitesse de récession, et elle est d'autant plus
grande que la
galaxie est plus lointaine : V0 = H0.d0 . H a depuis été
baptisée constante de Hubble, et la première valeur trouvée était
d'environ 500 km s-1. Notons que cette formule est valable à un instant
donné, c'est pourquoi on ajoute des indices "0" signifiant "aujourd'hui
pour nous autres terriens".
Ce genre de relation linéaire décrit
un univers en expansion uniforme généralisée. Il convient de bien
comprendre de quoi l'on parle : l'expansion est une expansion de
l'espace lui-même. Les
galaxies ne bougent pas réellement; elles sont
immobiles dans un espace en train de s'étirer. Ceci n'a rien de commun
avec l'explosion d'un objet dans un espace statique. On ne peut pas
observer le Big Bang comme on observerait l'explosion d'une mine; dans
le premier cas, le Big Bang crée l'espace et le
temps, vouloir
l'observer "de l'extérieur" n'a aucun sens.
Pour la même raison,
l'expansion n'a pas de centre, ou bien son centre est partout. Tout
observateur, sur n'importe quelle
galaxie, verra toutes les autres
galaxies s'éloigner de lui à des vitesses proportionnelles à leurs
distances.
On a coutume d'utiliser pour faire sentir l'expansion
de l'univers l'image d'un gâteau aux raisons secs qui lève et cuit dans
un four. La pâte du gâteau (supposée ici transparente) c'est l'espace
tridimensionnel que nous observons. Les raisins secs, les
galaxies.
Nous sommes sur l'un d'eux...
Le gâteau est de très grandes
dimensions, les bords hors de portée des observateurs. Tout raisin
constate que la pâte se gonfle de telle façon que tous les autres
raisins semblent le fuir, et il n'y a pas de raisin "central". Le
gonflement, en tout point du gâteau, se fait à la même cadence; mais
l'effet de cumul fait que les raisins les plus éloignés d'un
observateur quelconque s'écartent plus vite que ceux qui sont proches :
c'est la loi de Hubble. Les raisins ne changent pas de taille, eux. De
même, les
galaxies et leur contenu ne subissent pas l'expansion : leur
gravité propre "gèle" la structure de l'espace dans leur voisinage.
C'est heureux, car sinon nos étalons de longueur grandiraient au même
rythme que l'espace, et nous n'aurions jamais découvert l'expansion...
Les raisins ne bougent pas vraiment : chacun est au repos par rapport à
la pâte qui le touche.
La valeur de H0 est encore mal connue,
quelque part au voisinage de 60 ou 75 kilomètres par seconde par
mégaparsec. Un mégaparsec (Mpc) vaut 106 parsecs, soit 3.26 10
6
années-lumière, soit 3,08 10
19 km... Ceci nous
montre que 60 km.s
-1 Mpc
-1
équivalent à 1,94.10
-18 s
-1,
ou 6,14. 10
-11 an
-1. Ce
qui signifie que chaque kilomètre de l'espace, loin de toute
galaxie,
s'étire chaque année de 6,14.10
-11
km, soit 61,3 nanomètres ! C'est infiniment dérisoire, mais sur les
distances cosmiques, au cours des durées cosmiques, cela donne des
vitesses qui peuvent être très importantes.
La relation V0 =
H0.d0 est souvent utilisée pour trouver la valeur de la
distance d'une
galaxie lointaine. Mais attention : c'est V0 et H0 qui interviennent,
c'est à dire qu'il faut utiliser la valeur de la vitesse de la
galaxie
lointaine au moment de l'observation. Or la
lumière qui nous parvient
de cette
galaxie lointaine en est partie longtemps avant notre époque,
et le V que nous mesurons n'est pas V0 ! Pour des
galaxies pas trop
lointaines, jusqu'à ~500 Mpc, l'erreur n'est pas trop importante.
Le facteur d'échelle et le décalage cosmologique vers le rouge
Les
cosmologistes ont coutume de traiter les variations d'échelle dues à
l'expansion au moyen du facteur d'échelle R = R(t). Dire que R = 0,25
c'est dire que l'on traite d'une époque ou l'univers était quatre fois
moins étendu qu'aujourd'hui; R = 2 se réfère à une époque future où les
dimensions de l'univers seront deux fois plus grandes.
Lorsqu'une
galaxie lointaine nous envoie de la
lumière, celle-ci se dirige vers
nous à la vitesse c par rapport à l'espace, mais cet espace est en
expansion, et la
lumière doit donc "lutter" contre l'expansion pour
nous parvenir. Prenons une image plus parlante : Pierre et Paule sont
séparés de 10 km, et Pierre se dirige vers Paule à 5 km/h. Il la
rejoindra au bout de deux heures. Si cette fois ils sont installés sur
un ruban de caoutchouc qui s'étire de , disons, 20% par heure pendant
que Pierre marche dessus à 5 km/h, il est clair qu'il mettra plus de
deux heures pour rejoindra sa compagne. C'est ce qui se passe pour le
photon et toutes les ondes électromagnétiques, leur longueur d'onde
apparente est étirée d'un facteur 1+z (z est ce que les anglo-saxons
appellent le redshift, vocable universellement adopté par les
astronomes aujourd'hui) qui est donné par : Comme l'étude de
R(t)
est à la base des modèles cosmologiques, on comprend pourquoi les
astronomes attachent tant d'importance aux mesures de redshifts.
Aujourd'hui, le "record" se situe dans les z ~ 5,5 (1999).
Le Big bang: le début de l'expansion
Le
fait que l'univers soit en expansion amène tout naturellement à la
conclusion que dans le passé, il a du se trouver dans un état de
condensation plus importante. En remontant même le plus loin possible,
on est amené à envisager une époque où les
galaxies étaient si serrées
qu'elles se touchaient, et même, au-delà, une phase où toute la matière
et l'énergie de l'univers était dans un état de condensation extrême,
interdisant l'existence de structure complexes comme les étoiles ou
même les atomes eux-mêmes...Cette idée a été émise tout d'abord par
Lemaître, puis théorisée par Gamow.
Le film des débuts
Voici
ce que l'on pense actuellement être le début de notre univers. On va
voir que toute son histoire est dirigée vers une complexité de plus en
plus grande; cela commencera par la subdivision de la "force
universelle" encore inconnue en quatre forces distinctes :
- Gravitation
- Interaction nucléaire forte, responsable de la cohésion des
noyaux nucléaires.
- Interaction faible, à l'oeuvre dans certains processus de
désintégration atomique.
- Interaction électromagnétique.
et se poursuivra par la création des noyaux atomiques, des molécules,
des étoiles, des
galaxies, de la Vie...
t = 0 ??
Y
a-t-il eu un instant zéro? Le
temps a-t-il réellement eu un
commencement? Personne ne le sait. Les équations des théories dont nous
disposons actuellement cessent tout simplement d'être valides quand on
s'approche de cet instant, qui nous est tout aussi inaccessible que
s'il était un infini... S'il y a eu un instant zéro, peut- être ne
l'est-il que pour notre bulle d'univers, mais pas pour l'Univers dans
son ensemble; les théories les plus modernes de l'inflation chaotique
prévoient en effet que cet événement extrêmement violent qu'on appelle
le Big-Bang n'a pas été universel, mais qu'il y a sans cesse, dans une
sorte de mousse d'espace-
temps, des myriades de big-bangs créant ainsi
autant de bulles-univers dont les éventuels habitants sont à tout
jamais prisonniers... En tous cas, jusqu'à la prochaine date, on ne
peut rien dire : la Physique dont nous disposons est incapable de
décrire ce qui s'est passé avant cet instant lointain qu'on appelle le
temps de Planck : 10
-43 seconde, un
dix-millionième de
milliardième de milliardième de milliardième de milliardième de
seconde. C'est là le domaine de cette force universelle, décrite par
une théorie de tout qui reste à écrire. C'est là aussi que devrait se
situer la séparation de gravitation d'avec les trois autres forces.
t=10-43s
Naissance
de l'espace-
temps; le rayon de l'univers observable est minuscule : 10
micromètres, la température est de 1032 K, la densité est 1096, ce qui
signifie qu'un simple litre d'univers aurait l'incroyable masse de
1000...ici, 96 zéro....000 kilogrammes!
t = 10-35 s
L'univers
subit un "changement de phase", analogue à la cristallisation d'un
liquide qui se solidifie en perdant son caractère inorganisé et en
dégageant de l'énergie; c'est le moment où l'
Interaction nucléaire forte, qui est responsable de la cohésion des noyaux nucléaires, se
différencie de l'interaction électrofaible. Mais ce changement de phase
est retardé : l'univers reste un certain
temps en "surfusion", comme de
l'eau que l'on peut conserver liquide jusqu'à -10C, mais qui se prend
instantanément en glace si l'on ébranle le flacon. Dans cette phase de
surfusion, l'univers tend vers un état appelé "faux vide" qui crée,
jusqu'à l'instant t = 10-32 s, un dégagement d'énergie produisant une
expansion d'une inimaginable brutalité : pendant cette période
incroyablement courte, les dimensions de l'univers sont multipliées par
1050 (100 000 milliards de milliards de milliards de milliards de
milliards...) et son volume par 10150, au moins! Dans le même moment
est créée une formidable quantité de particules (tout le contenu
matériel de l'univers en fait), création compensée par l'énergie
gravitationnelle négative créée en même
temps. La température de
l'univers, qui avait baissé avec l'expansion, remonte jusqu'à 1027 K.
C'est ce que l'on appelle la période inflationnaire. Elle est très
courte, mais fixe néanmoins dans cette fraction de seconde toutes les
caractéristiques de l'univers que nous observons aujourd'hui : nombre
de dimensions, lois de la physique. Toutes les dimensions ne subissent
pas l'inflation et l'expansion, comme nous l'avons déjà signalé :
seules trois dimensions d'espace sont concernées, les autres restant
enroulées très serré, avec la courbure qu'elles avaient au
temps de
Planck...
On se retrouve ensuite dans les conditions du Big-Bang
classique, mais avec un diamètre de la bulle-univers infiniment
supérieur, cette bulle n'étant elle même qu'une infime partie de
l'Univers dans son ensemble.
t = 10-12 s
L'univers,
âgé d'un millionième de millionième de seconde, subit une nouvelle -et
dernière- "cristallisation" quand force faible et électromagnétisme de
séparent. Il sera dorénavant régi par les lois de la physique telles
que nous les connaissons aujourd'hui. Son diamètre est à peu près celui
de l'orbite terrestre, sa température de 1015 K (un million de
milliards de degrés), sa densité de 1033.
t = 10-6 s
L'univers
est âgé d'un millionième de seconde, son diamètre est d'environ une
année-lumière, sa température de 1013 K (10000 milliards de degrés). On
entre dans ce que l'on appelle l'ère hadronique, où se fixent les
populations de protons et neutrons. Jusqu'ici, les paires protons et
anti-protons, neutrons et anti-neutrons, étaient sans cesse créées à
partir de l'intense rayonnement qui remplit l'univers, pour se
désintégrer mutuellement aussitôt; ce n'est plus possible, l'énergie
n'est plus assez élevée, et presque tous les protons et neutrons
disparaissent, sauf le petit supplément -un milliardième- de particules
normales en excédent (il se trouve que la nature a une légère
dissymétrie en faveur de la matière "normale"). Ainsi est expliquée
l'absence d
'antimatière dans l'univers, de nos jours.
t = 10-4 s
L'univers,
âgé d'un dix-millième de seconde, rentre dans l'ère leptonique. Ces
noms bizarres, aux racines grecques, rappellent simplement quel type de
particules domine à ce moment-là. Il est rempli d'une soupe de photons
("grains de
lumière", si l'on veut), d'électrons et de neutrinos, plus
quelques protons et neutrons, les rescapés dont nous avons déjà parlé.
L'univers est totalement opaque au rayonnement : il est encore beaucoup
trop dense.
t = 1s
La
température de l'univers, qui fête sa première seconde, est tombée à 10
milliards de degrés, une misère, et sa densité à 100000. Se produit
alors le second grand nettoyage : anti-électrons et électrons
s'annihilent dans une grande apothéose de
lumière; ne subsiste que le
petit milliardième excédentaire d'électrons "normaux", ceux que nous
voyons aujourd'hui. Les neutrons, instables quand ils sont isolés, se
désintègrent et se raréfient. Il n'y a presque plus que de la
lumière
dans l'univers...
t = 100s
Après
plus d'une minute, voici que commence la formation des noyaux
atomiques, étape cruciale s'il en est. Pour l'hydrogène, il n'y a rien
à faire, puisque son noyau est constitué d'un simple proton. Vont se
former les noyaux de deutérium (p+n), de tritium (p+2n), instable, et
qui se décompose rapidement, d'hélium (2p+2n), de lithium (3p+2n), et
quelques traces des éléments suivants. C'est ce que l'on appelle la
nucléosynthèse primordiale.
t = 180s
L'univers
est âgé de trois minutes, et il est déjà trop vieux, trop dilué, pour
que les réaction nucléaires se poursuivent efficacement! La
nucléosynthèse s'arrête donc, l'univers est alors constitué de 3/4
d'hydrogène et de 1/4 d'hélium, proportions qu'il a encore de nos
jours, en gros. Il faudra attendre la naissance des étoiles pour voir
repartir le processus, avec, cette fois, la possibilité de fabriquer
aussi des noyaux lourds.
t = 300000 ans à un
million d'années
La
température est suffisamment basse pour que les noyaux et les électrons
libres s'associent pour former les atomes; la fixation des électrons
laisse le chemin libre pour les photons, pour la
lumière : l'univers
devient brutalement transparent! Les cosmologistes appellent assez
improprement cet instant époque de la recombinaison, alors qu'il s'agit
en fait de la toute première combinaison des ions et des électrons. Le
rayonnement électromagnétique qui emplissait l'univers, ainsi libéré
des interactions avec la matière, va poursuivre librement son évolution
qui se résume à une dilution progressive due à l'expansion universelle.
Un
second fait important se produit vers la même époque (un peu avant sans
doute) : jusqu'ici, c'était la densité d'énergie de la
lumière qui
l'emportait; maintenant, du fait de lois de dilution avec l'expansion
différentes, l'univers est dominé par la matière. Le rayonnement ne
représente plus, de nos jours, qu'un millième de la densité générale.
t = 1 à 5 milliards
d'années
La
libération de la
lumière libère aussi la matière, qui peut commencer à
évoluer sous la seule emprise de la gravitation. Les premières
condensations se mettent à grossir, et les premières étoiles naissent,
avant les
galaxies, semble-t-il; elles sont très massives, ont une vie
brève, et produisent une énorme quantité d'éléments lourds quand elles
explosent en supernovæ. Leurs restes, étoiles à neutrons ou trous
noirs, s'agglomèrent au centre des
galaxies pour former des trous noirs
galactiques; parfois s'y déclenche le phénomène
quasar.
t = 5 à 10 milliards
d'années
Les
étoiles de seconde, troisième,... génération se sont formées dans ce
milieu enrichi en éléments lourds; carbone, fer, oxygène, azote, etc...
sont maintenant présents en quantité, et des planètes peuvent se former
en abondance autour des étoiles naissantes. Sur ces planètes, la Vie
trouvera les éléments nécessaires à son apparition !
Une théorie solidement ancrée sur l'observation
Nous
citerons maintenant trois "succès" du Big Bang, mais il y en a
d'autres, comme la prédiction de l'existence de trois et seulement
trois espèces de neutrinos et la relativement bonne cohérence de l'âge
de l'univers avec celui des plus vieilles étoiles.
Le rayonnement de fond diffus cosmologique
Le
Big Bang n'a pas été accepté immédiatement, entre autres parce que,
poussé aux limites, il semble prévoir au début une singularité, où les
dimensions s'annulent et où la densité devient infinie. Le nom de Big
Bang lui a d'ailleurs été donné un peu en dérision par les tenants
d'autres scénarios. Il est donc important de voir quels sont les faits
indiscutables qui font qu'aujourd'hui plus personne ne conteste que
l'univers ait connu une phase initiale à très haute température et très
grande densité.
Une des prédictions de ce modèle est lié au
découplage matière-rayonnement qui s'y produit entre t = 300000 ans et
t = 1 million d'années. De sa température de 4000K environ au moment du
découplage, le rayonnement universel est ainsi tombé, selon la théorie
du Big Bang, à quelques K à notre époque; ce n'est plus qu'un
rayonnement fossile....
Dans les années 60, deux
radio-astronomes, Arno Penzias et Robert Wilson, essayaient de
reconvertir en radio-télescope une antenne d'observation désaffectée du
satellite Echo. Un "bruit" radioélectrique, isotrope, uniforme, sans
variation diurne ou saisonnière leur rendait la vie impossible en se
superposant obstinément à toutes leurs observations. Au hasard d'un
voyage, l'un d'eux faisait part de leurs difficultés à un astronome qui
connaissait des cosmologistes lancés à la recherche du rayonnement
fossile du Big Bang. Et en Juillet 1965 deux articles de
l'Astrophysical Journal pouvaient ainsi annoncer la découverte de cette
trace indiscutable du Big Bang, le fond diffus cosmologique. Cela
vaudra le prix Nobel de physique 1978 à Penzias et Wilson...
On
a pu depuis vérifier que le FDC ainsi détecté avait exactement (à
1/10000e près) la forme spectrale prévue par la théorie : c'est un
rayonnement de corps noir à 2,73K. Aucune théorie cosmogonique autre
que le Big Bang ne prévoit un tel phénomène. Notons que le FDC, bien
avant de se découpler de la matière, avait été créé par divers
processus physiques lorsque l'univers était beaucoup plus jeune (~ 1
an). Sa température, identique alors à celle de la matière, était
supérieure à 107 K.
L'abondance relative des éléments
Entre
une et trois minutes, l'univers primordial est suffisamment refroidi
pour que s'assemblent protons et neutrons, les briques constitutives
des noyaux atomiques. Mais la décroissance continue de la température
arrête très vite le processus : âgé de trois minutes, l'univers est
déjà trop vieux, trop froid, pour créer de nouveaux noyaux... Les
théories du Big Bang standard prédisent avec beaucoup de succès les
quantités respectives de d'hydrogène, de deutérium, d'hélium et de
lithium produites dans ces deux minutes cruciales. Par exemple, elle
donnent une proportion (massique) de 3/4 H pour 1/4 He : c'est bien ce
qui est observé, compte tenu du fait que le fonctionnement des étoiles
influe sur ce rapport; cela correspond à 94% d'atomes d'hydrogène pour
5,9% d'atomes d'hélium. On étudie sutout le rapport D/H, dans les
nuages de gaz interstellaires (D/H ~2 10-5), critère plus efficace pour
tester les théories de Big Bang.
La formation des étoiles, des galaxie et des grande structure
La
théorie du Big Bang fournit un cadre dans lequel on peut expliquer la
formation des objets matériels de l'univers, et ce n'est pas là son
moindre succès. Nous avons vu que les fluctuations de densité
s'amplifient tout naturellement au moment de la recombinaison, et même
un peu plus tôt dans l'histoire de l'univers, lorsque la densité de
matière l'emporte définitivement sur celle de la lumière. Il faut noter
que, par contre, elle ne nous dit pas pourquoi il y avait déjà des
fluctuations initiales à amplifier ! Et c'est là un problème qui reste
insoluble dans le cadre du Big Bang classique, et auquel l'inflation
apporte une réponse. On ne sait pas non plus si ce sont les structures
de la taille des
amas de galaxies ou les structures de la taille des
amas stellaires qui se forment en premier; mais un certain nombre de
pistes amènent actuellement à préférer les scénarios "du bas vers le
haut", où l'on commence par voir se former d'abord des
amas stellaires.
Les observations du Hubble Deep Field, par exemple, semblent nous
montrer, à très grande
distance, une foule de
galaxies en formation par
la condensation d'
amas stellaires bleus (c'est à dire jeunes) déjà bien
caractérisés.
Le Big bang n'est pas la théorie du tout
Le
Big Bang n'explique pas tout, bien entendu. Par exemple, il n'explique
pas la raison de la dissymétrie matière /
antimatière dans l'univers.
Il n'explique pas non plus quel est le processus qui a fixé les valeurs
des paramètres fondamentaux comme ou . Ceci nécessite une
physique nouvelle; pour l'instant, la
constante cosmologique , comme la
constante G de la gravitation, est un paramètre de la
relativité générale, rien de plus : on ne voit pas de raison physique à sa valeur
actuelle. Qu'on ne connaît d'ailleurs pas.